Vie du collège

Les 4ème 3 et les 4ème 4 ont découvert que parfois 1+1 n'est pas égal à 2

Par CLAIRE GASCARD, publié le vendredi 31 mai 2024 12:51 - Mis à jour le samedi 1 juin 2024 11:35
Une mise en scène qui ouvre sur des univers parallèles...
Le 15 mai, une troupe de théâtre nous a présenté : « l’épopée quantique » , une mise en scène des lois de la physique quantique. Ce spectacle rythmé, vivant et accessible a fait revivre les grands épisodes de la physique quantique.

De l’origine de l’univers à la découverte du boson de Higgs, trois personnages, Paul, Mona, et Mag incarnés par les comédiens de l’association Science Émerveille, nous ont « interprété » les principes mathématiques de l’infiniment petit.

 

En 1911, Rutherford confirme l’existence de l’atome, ce que Galilée et Descartes avaient affirmé. L’atome est constitué d'un noyau de protons et de neutrons et d'un nuage d'électrons. L’atome sera caractérisé par un numéro atomique qui correspond à son nombre de protons, qui est aussi celui de ses électrons.

La découverte des particules élémentaires a changé notre compréhension de l’univers.

Lord Kelvin, après avoir établi le zéro absolu comme étant la température à laquelle plus aucune chaleur ne peut être tirée du corps, puis avoir estimé l’âge de la Terre et du Soleil, pensait que la physique n’avait plus rien à découvrir.

Mais des physiciens comme Planck, qui découvrit l’une des constantes fondamentales de l’Univers, ou Boltzmann, père de la physique statistique, ont ouvert bien grand d’autres portes. Souvent, en physique, la théorie précède la confirmation observable[i].

Einstein montre ainsi dès 1905 que la lumière est à la fois une onde et une particule.

Plus récemment, l’hypothèse théorique de Higgs en 1964 a pu être confirmée… le 4 juillet 2012 par le CERN (Conseil Européen pour la Recherche Nucléaire), le plus grand centre de physique des particules au monde. Cette découverte d’une nouvelle particule[ii] (« la particule de dieu ») nous a fait faire un pas de géant dans notre compréhension de la structure fondamentale de la matière.

 

Ces concepts ardus nous sont devenus sympathiques puisque la reine d’Angleterre s’est, par exemple, invitée sur scène dans le débat houleux entre Boltzmann et Lord Kelvin.

Les comédiens ont fait tout leur possible pour que l’on puisse comprendre un peu de cette physique fascinante, se déguisant parfois en particules. Et des scènes joyeuses se sont succédé, ajoutant une pincée d’humour à l’histoire de ces découvertes quantiques.

Ainsi, le débat entre Born[iii], Schrödinger[iv] et Heisenberg[v], physiciens qui ont tenté de comprendre le monde quantique à la suite d’Einstein, fut une joute verbale inattendue. Heureusement pour nous car ces théories géniales n’en sont pas moins extrêmement complexes et perturbantes.

 

En effet, que diriez-vous si l’on vous révélait que la physique quantique implique la disparition du temps, la possibilité que des particules soient à différents endroits en même temps, la certitude que le vide n'est pas tout à fait vide, l’existence d’univers parallèles et le fait que non, 1 + 1 ne fait pas toujours 2 !

 

Si le chat de Schrödinger est à la fois vivant et mort (oui, vous avez bien lu) nous ne pouvions que nous questionner sur notre perception de la réalité et…sur la réalité elle-même.

Cette expérience imaginée en 1935 par le physicien Schrödinger est mondialement connue. Ce dernier écrivit à Einstein pour lui expliquer un paradoxe[vi], celui de la théorie quantique mise à l’échelle humaine. La physique quantique se base en effet sur des probabilités, des statistiques : elles ont été validées, sont justes…mais elles s’opposent à ce que nous percevons du monde dans notre vie quotidienne.

Imaginons un chat (pourquoi un chat ? Mystère ! Comme le chat du Cheshire dans Alice au pays des merveilles, il reste totalement imaginaire) enfermé dans une boîte close, avec un atome radioactif dont la demi-vie est égale à une heure[vii], une fiole de poison et un compteur Geiger, appareil qui mesure la radioactivité.

Dès le premier noyau radioactif désintégré, le compteur Geiger déclenche un mécanisme qui casse le flacon et libère le poison mortel. Après une heure, si l’atome a été désintégré, le chat est mort ; dans le cas contraire, le chat sera encore vivant. On ne peut le savoir qu’en ouvrant la boîte car on ne voit pas à l’intérieur.

Or, la fonction d’onde s’effondre dès qu’on ouvre la boîte et qu’un état unique est déterminé.

Si l’on applique les théories quantiques[viii] à cette expérience, avant l’ouverture de la boîte, selon les lois quantiques, le chat est donc à la fois vivant et mort.

Perturbant, non ?

 

Cette tornade intellectuelle, nous l’avions vécue en abordant l’univers fantastique en français. Notre monde réaliste, coutumier et vraisemblable, y devient le ferment fantastique, dans tous les sens du terme, d’une littérature de tous les possibles.  Les statues y sont amoureuses d’un homme, les meubles se déplacent seuls et vivent leur vie, les astres utilisent le journal pour nous passer un message…

Imaginer pour écrire, imaginer pour faire des équations : est-ce la même curiosité féconde ?

Observer pour comprendre et créer, observer pour analyser et déduire, pour douter et réfléchir… et sans cesse sur le métier remettre son ouvrage[ix], sans se décourager ?

Finalement, la science et la littérature ont ce point commun d’ouvrir sans cesse des portes insoupçonnées à qui veut bien remettre en question ses certitudes.

 

Un hommage fut rendu à tous ces cerveaux masculins bien connus et aux cerveaux féminins de physiciennes souvent restées dans l’ombre d’un grand homme de science. Ainsi en fut-il pour Henriette von Aigentler, brillante étudiante de l’Ecole Normale de Graz en Autriche. En 1872, elle voulut poursuivre ses études en mathématiques et en physique à l’Université alors interdite aux femmes ! Elle devint cependant la première femme à suivre les cours de Mathématiques, Physique et Philosophie à l'Université de Graz comme « auditrice extraordinaire ». Elle épousera Boltzmann avec qui elle travaillera.

 

La conclusion de cette matinée se fit sur une dernière question : science et religion sont-elles en opposition ? Nous avons déduit qu’il n’existe pas de dualité puisque l’une et l’autre ne poursuivent pas le même but !

Le raisonnement mathématique propre à la physique s’appuie sur l’exercice du doute et de l’esprit critique, s’interroge sur le « Comment ? » tandis que la religion, au sens large de questionnement spirituel, tente de répondre à la question : « Pourquoi ? »

 

Cette quête du comment et du pourquoi nous a donné le vertige ! Mais heureusement, l’humilité de beaucoup de grands physiciens, tels Einstein ou HIggs, reste un enseignement : gardons les yeux ouverts, une curiosité insatiable et la volonté de comprendre et de créer en toute modestie.

 

Pour ne pas perdre espoir quand les difficultés intellectuelles nous semblent insurmontables, n’oublions pas Einstein :

« Ne t’inquiète pas si tu as des difficultés en maths, je peux t’assurer que les miennes sont bien plus importantes ! »

 

 

[i] « Si les faits ne correspondent pas à la théorie, changez les faits. » Albert Einstein

[ii] Il ne s’agit pas de quelque chose que l’on peut voir : on déduit son existence. Cet article de 2018 du National Geographic l’explique bien et renvoie aux découvertes permises par cette avancée en physique :

https://www.nationalgeographic.fr/sciences/2018/09/la-desintegration-du-boson-de-higgs-a-enfin-ete-observee.

[iii] Prix Nobel de physique en 1954, avec Walther Bothe, pour ses travaux sur la théorie des quanta.

[iv] Prix Nobel de physique en 1933, pour son apport au formalisme théorique de la physique quantique.

[v] Prix Nobel de physique en 1932, pour la création de la mécanique quantique.

[vi] Affirmation surprenante qui contredit les idées reçues, l'opinion courante.

[vii] Cela signifie qu’après une heure, la probabilité que le noyau de l’atome se soit désintégré est égale à 0,5.

[viii] En mécanique quantique, un objet est décrit par son état quantique lequel est contenu dans sa fonction d’onde. Cette fonction est calculée grâce à l’équation de Schrödinger. Dans cette équation, la combinaison de deux solutions de l’équation forme elle aussi une solution.

[ix] « Hâtez-vous lentement, et sans perdre courage, Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage, Polissez-le sans cesse, et le repolissez, Ajoutez quelquefois, et souvent effacez. » Nicolas Boileau, L’Art poétique, Chant I.

 

 

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